Deux centres de formation sont implantés à Pleyel depuis 2012 : l’école normale supérieure Louis-Lumière et l’École de la Cité de Luc Besson. Zoom sur deux approches d’enseignement distinctes. Les deux établissements sont gratuits, hors frais de scolarité. Une aubaine pour les étudiants qui ont le privilège d’être au contact des professionnels du son et de l’image (producteurs, réalisateurs, techniciens…).
À l’instar de Pinewood à Londres ou Cinecittà à Rome, la Cité du Cinéma est un vaste complexe qui regroupe toutes les compétences de la chaîne de production cinématographique (écriture, création de décors, tournage, post-production…). Situé à proximité du carrefour Pleyel, ce haut lieu du 7e art, construit pour rivaliser avec les studios du monde entier, héberge neuf plateaux de tournage d’une surface totale de 9 500 m².

Avec quasi 90 ans d’ancienneté, l’école normale supérieure Louis-Lumière est une institution publique qui dispense des enseignements dans trois sections : cinéma, photographie et son. Condition préalable pour intégrer la prestigieuse école qui a notamment formé Jacques Demy, Fred Zinnemann, Jean-Jacques Annaud ou Gaspar Noé : avoir le niveau bac + 2.
« Accessible en dehors du circuit scolaire »
Lancée en 2012 par Luc Besson, l’École de la Cité est quant à elle une école privée qui propose des cursus dans les deux métiers phare du cinéma : auteur/scénariste et réalisateur. Contrairement à Louis-Lumière, nul besoin de diplôme pour intégrer l’école.
« Nos deux critères de sélection sont les suivants : avoir entre 18 et 25 ans et avoir beaucoup de talent, explique Laurent Jaudon, le directeur de l’École de la Cité. Notre concours est accessible aux jeunes en dehors du circuit scolaire. » Luc Besson désirait en effet que « les jeunes passionnés qui n’ont pas trouvé leur chemin par la voie classique puissent avoir une alternative ».
Et Isabelle Agid, la vice-présidente de l’école, d’ajouter : « L’idée, c’est de faire gagner du temps aux nouveaux talents car les jeunes sans diplômes sont aussi talentueux que les autres. » La marque de fabrique de l’École de la Cité ? Développer la créativité en s’appuyant sur un enseignement basé sur la pratique et la connaissance du terrain.

« Nous stimulons nos étudiants en les faisant écrire et tourner au maximum, explique Laurent Jaudon. Nos élèves apprennent en faisant. Les devoirs se font à l’école, les cours à la maison. Cela leur permet de faire des erreurs pour pouvoir les rectifier. » Une analyse confirmée par Jamel, en 1re année réalisation : « La formation n’est pas hyper théorique. La répétition des exercices permet d’assimiler et d’apprendre à repérer ses fautes.
Résultat, on apprend à vitesse accélérée et on se professionnalise rapidement. » D’autant plus que les intervenants sont pour la plupart des professionnels de l’audiovisuel et du cinéma.« Le retour des pros sur notre travail est très précieux, confirme Valentin, en 1re année scénario. Cela nous permet de découvrir la réalité du milieu. » En particulier quand on a la chance de faire des master classes avec Luc Besson, mais aussi Dominique Farrugia et Alain Chabat, respectivement parrains des 2e et 3e promotions de l’école.
Ce dernier s’investit d’ailleurs énormément selon Justin, en 1re année scénario : « On a d’abord assisté à son cours en petits groupes en début d’année. Je lui ai ensuite envoyé le synopsis de mon scénario. J’ai reçu un retour très détaillé, comme les trente élèves de la promo à qui il a pris le temps de répondre personnellement. »
« La technique est importante »
Du côté de Louis-Lumière, l’enseignement est avant tout dispensé par des enseignants permanents (principalement des universitaires et chercheurs), même si de nombreux professionnels assurent régulièrement les master classes. « La spécificité de l’école, ce sont des allers-retours entre la théorie et la pratique, la technique et l’artistique », selon son directeur de la communication et du développement Méhdi Aït-Kacimi.
À titre d’exemple, un enseignement d’optique démarrera par un cours magistral suivi d’une séance en laboratoire, avant les phases d’expérimentation et de création durant le tournage d’un film. À la différence de l’École de la Cité, Louis-Lumière met le paquet sur les fondamentaux : « La dimension technique est importante dans notre école car nos métiers évoluent rapidement, souligne Méhdi Aït-Kacimi. Il ne suffit pas de savoir presser sur un bouton mais d’avoir une vision globale des technologies utilisées. Les ingénieurs du son et les directeurs de photographie ont besoin de solides bases scientifiques et techniques. Quant aux réalisateurs, ils ont besoin de bien maîtriser la technique pour être respectés par leurs équipes. Le cinéma a toujours été lié à l’évolution de l’industrie. Les réalisateurs de la Nouvelle vague utilisaient par exemple des caméras légères et des pellicules sensibles. »
Pour approfondir ces connaissances, l’école a opté pour la pédagogie du petit nombre : 150 étudiants répartis par promotions de 16 dans chaque section. Enfin, pour faire taire ceux qui seraient tentés de critiquer l’élitisme de sa formation, l’école a lancé en 2012 la « Classe égalité des chances » en partenariat avec la Fondation Culture et Diversité. Un accompagnement aux concours de 27 séances de remise à niveau pour des étudiants issus de milieux modestes. « Pour que les élèves ne se ferment pas les portes car on sait bien que la réussite aux concours dépend de facteurs sociaux-culturels », dixit Méhdi Aït-Kacimi. Résultat : deux élèves du programme ont intégré Lumière en 2015. Pendant ce temps-là, l’École de la Cité recrutait 60 jeunes sans condition de diplôme. Reste à savoir combien réussiront à vivre de leur passion dans les années à venir.