Vaccination, tests antigéniques : quel rôle pour les médecins ?

Campagne de vaccination, principaux modes de contamination, dépistage ciblé, tests antigéniques à l’approche des fêtes de fin d’année, rémunération des consultations de pré-vaccination… Toutes ces problématiques ont été abordées ce jeudi 10 décembre lors de la conférence de presse du syndicat MG France, qui portait principalement sur le rôle que devraient jouer les médecins généralistes dans le déconfinement, la prévention et la vaccination.

 

Quels sont aujourd’hui les deux principaux modes de contamination en France ? Le domicile (cercle familial) et l’entreprise, selon la dernière enquête de MG France qui a interrogé 900 médecins généralistes. Ceux-ci ont demandé à leurs patients (4 500 au total) comment ils pensaient s’être contaminés. Plus de 35 % d’entre eux ont répondu avoir été contaminés au domicile, ce qui n’étonne pas le Dr Jacques Battistoni, président de MG France, « parce qu’on mange ensemble dans le cercle familial, parce qu’on partage beaucoup de moments, parce que l’on vit dans des espaces relativement confinés. Cela nous interroge sur ce qui va se passer en cette fin d’année avec les fêtes…». Quant à l’entreprise, c’est également un lieu « où l’on déjeune ou l’on dine ensemble, et c’est à moment-là qu’on tombe le masque… », a poursuivi Jacques Battistoni qui est parti des résultats de cette enquête pour réfléchir à la manière dont la France pouvait mettre en place une stratégie de dépistage efficace.

Quid d’une stratégie de dépistage ciblé ?

A la question de savoir s’il faut continuer à tester indifféremment les personnes qui se présentent parce qu’elles sont inquiètes ou adopter une stratégie de dépistage ciblé de la population, le président de MG France considère que : « notre enquête nous laisse penser que l’on a certainement intérêt à tester autour des lieux de contamination les plus fréquents. Quand vous faites du télétravail à domicile, vous n’avez pas forcément besoin de vous faire tester. Mais si vous partagez des moments avec vos collègues, si vous êtes dans un lieu où vous êtes relativement confinés, vous avez probablement intérêt à faire une stratégie de dépistage ciblé dans le cadre des lieux de travail. »

A une échelle plus large, une stratégie de tests ciblés pourrait s’appliquer aux endroits qui auraient été repérés comme étant les plus contaminants, selon Jacques Battistoni : « Si, par exemple, dans une région ou une commune, on se rend compte qu’il y a plus de tests positifs qu’ailleurs, on a peut-être intérêt à faire des tests assez massifs dans ces endroits-là.»

Réaliser un test antigénique avant Noël a-t-il un intérêt ?

Autre problématique importante abordée lors de la conférence de presse. Que peuvent répondre les médecins à leurs patients qui leur disent « ma famille et moi allons faire un test antigénique le 23 décembre pour pouvoir réveillonner tranquille » ? Si l’on sait que le test antigénique est moins performant que le test de référence (RT-PCR), il a un intérêt non négligeable, a rappelé le président de MG France : « Il permet de repérer les patients qui vont être les plus contaminants. On sait qu’il est relativement performant quand quelqu’un a une charge virale élevée. Et on sait qu’il a une faible sensibilité si le patient n’est pas très contaminant, voire même s’il est asymptomatique. » Cela signifie donc que, en cas de test antigénique positif, les personnes sont « a priori contaminantes, donc elles doivent rester en isolement pendant toute la période de contagion et ne doivent pas aller rencontrer leur famille. Elles ne peuvent ne pas se contenter de mettre le masque sur le nez ».

Si, en revanche, le test antigénique est négatif, la personne devra rester prudente, car cela ne signifiera pas « il n’y a pas de problème, j’enlève le masque et je ne suis pas contagieux. » Cela indiquera simplement que cette personne n’était pas très contaminante au moment où elle a fait le test. Mais « elle peut avoir été contaminée après ou avoir fait le test au mauvais moment, donc ce test-là n’est en aucun cas un brevet qui leur permet de faire tout ce qu’ils veulent, et de passer les fêtes de Noël sans prendre de précautions. »

Que répondre aux patients qui s’interrogent sur la vaccination ?

Les généralistes sont également confrontés à une patientèle qui se pose de nombreuses questions sur la vaccination. « Est-ce que le vaccin protège mon entourage quand je suis vacciné ? Est-ce que l’on doit se vacciner si l’on déjà été malade (positif au Covid-19, NDLR) ? À quel moment il faudra faire un rappel ? ». Telles sont les questions qui reviennent souvent, selon Jacques Battistoni, qui ajoute que de nombreux patients sont « méfiants » vis-vis de la vaccination. La mission des médecins généralistes sera donc « de contribuer à éclairer le débat, notamment en s’informant nous-mêmes au maximum ». Sur ce point, le ministère a promis un questions-réponses à destination des médecins pour les aider à répondre aux interrogations les plus fréquentes.

Le président de MG France pense également que le médecin généraliste aura un rôle important de prescripteur de la vaccination. Mais aussi que sa présence sera « indispensable pour garantir la sécurité de la vaccination. Après, que cela soit un médecin, une infirmière ou un pharmacien qui fasse l’injection lui-même, ce n’est pas un problème. Ce n’est pas compliqué de faire l’injection ». En revanche, ce qui est plus important à ses yeux, « c’est la présence d’un médecin, de façon à être prêt à intervenir en cas de réaction allergique un peu importante. Donc, si c’est une infirmière qui fait l’injection, il est prudent que le médecin soit à proximité. »

Enfin, concernant le calendrier, les médecins généralistes vont intervenir à double titre durant la première phase de la vaccination qui devrait démarrer en janvier dans les Ehpad. D’abord, en tant que médecins coordinateurs, lesquels seront eux-mêmes en lien avec les médecins traitants pour organiser les modalités de la vaccination. Puis les généralistes pourront ensuite vacciner dans leurs cabinets à partir du mois de février avec le vaccin Moderna, avec les caractéristiques que l’on connait : « un vaccin qui se conserve au froid, un rappel au bout de trois semaines », selon Jacques Battistoni. Ses modalités de conservation sont un peu plus faciles et souples que celui de Pfizer « qui nécessite d’être utilisé dans les 5 à 6 jours, contre 3 à 4 semaines pour le vaccin Moderna, ce qui nous facilitera la tâche ». Par ailleurs, c’est le vaccin de Pfizer qui sera privilégié dans la phase 1, a précisé le secrétaire général de MG France, le Dr Jean-Louis Bensoussan, qui attend encore des précisions sur les vaccins de la part du ministère. Autre point d’interrogation : la rémunération de la consultation de pré-vaccination qui n’a encore fait l’objet d’une négociation avec le gouvernement, ni avec l’assurance maladie.

Julien Moschetti

Publié sur Medscape le 11 décembre 2020.

Comments are closed.